11/03/2018

Le vin : introduction (blanc, rouge, rosé)



La vigne qui sert à produire le raisin destiné à la vinification est une liane, connue également sous le nom de Vitis Vinifera (la science, toujours prête à simplifier les mots). En général, les racines d'une vigne (plantée et épanouie, bien sûr) s'enfoncent dans les cinquante premiers centimètres du sol. Cet arbuste fruitier va donc se nourrir de nombreux éléments que l'on retrouve sous terre, dont les fameux nutriments, indispensables au développement de tout organisme vivant (même pour nous, les humains). Le sous-sol du terroir a également un rôle extrêmement important, puisqu'on y trouve la roche mère non altérée (le coeur du terroir, en somme).

La géologie influe énormément sur le produit final, c'est ce qui va également permettre (très souvent) de choisir le cépage et le porte-greffe adapté à notre sol (donc orienter notre conduite agricole, évidemment). Je vous épargne néanmoins les détails et les concordances d'usage que l'on peut croiser chez nos amis viticulteurs, nous en explorerons certains au cours de nos péripéties de toutes manières. Toutefois, si cela vous intéresse plus en profondeur, n'hésitez pas à visiter quelques sites sur le sujet, voir même à obtenir des encyclopédies dédiées. Cette facette du vin est très passionnante ainsi qu'utile qui plus est, si vous avez un tant soit peu la main verte (petit conseil cependant : attention à ne pas vous perdre dans trop de technique, surtout si vous êtes au stade de l'initiation dans ce vaste univers).

Voyons maintenant quelles sont les bonnes conditions à réunir pour la viticulture. Globalement, il y a des points incontournables, bien que chaque région viticole possède sa propre façon de travailler (voir même chaque vigneron, si on y regarde de plus près). La vigne s'exprime idéalement sur des coteaux (pourquoi? Essentiellement pour le drainage de l'eau, qui s'écoule, au lieu de stagner, en coteaux), plus ou moins pentus, escarpés, en altitude plutôt basse (pas ou peu de vigne présente en haute montagne, pas impossible mais plus rude et risqué). Le climat qui lui convient est un climat tempéré. Afin de l'alimenter naturellement en eau, mais aussi de lui faire bénéficier d'une chaleur suffisamment présente (la lumière naturelle du soleil est également vitale, comme pour toute plante), nécessaire à la bonne maturité des raisins.

Sans soleil pas de sucre, sans sucre pas d'alcool, sans alcool pas de vin (vous en pensez ce que vous voulez, c'est la loi). Si ces règles là sont des bases sûres, certains vins se font évidemment un malin plaisir de chambouler tout ça. Ce qui ne leur empêche pas d'offrir, tout de même, des résultats intéressants. Le meilleur exemple (connu par beaucoup) est celui du Sauternes (Bordelais), où des micro-climats (apportés, notamment, par des cours d'eau) exercent une influence exceptionnelle sur les vignes (brume enveloppante qui cache un ensoleillement doux, donc transformation des raisins, qui deviennent alors ce qu'on appelle des "grains nobles", sous l'action d'une pourriture qui est séchée en même temps qu'elle est générée, pour faire simple). Des phénomènes similaires se retrouvent dans diverses appellations (les Alsaciens, encore un autre exemple, nomment ces vins, dont le nom est protégé ; "Sélection de Grains Nobles"), où ce système naturel est employé dans la fabrication de vins liquoreux.

Rien qu'en deux paragraphes, on peut facilement conclure que la nature est la première clef de l'immense coffre à trésor du monde viti-vinicole. Considérez donc que ce même coffre possède deux serrures assez complexes. La seconde étant l'Homme, logiquement, et son action dans les vignes, mais aussi dans les chais. Bien que les tracas de la nature ne puissent, aujourd'hui, pas tous être contrés par le vigneron, il en existe un certain panel qui peut être réajusté. Pour bien faire, déjà, le viticulteur doit s'atteler à la vigne : planter, tailler, effeuiller, traiter. Bref, jusqu'aux vendanges, l'Homme doit veiller à ce que ses cultures se portent bien, ou en tout cas pour le mieux. Il doit, par conséquent, maîtriser parfaitement le cycle végétatif de la vigne. En voici un schéma ci-dessous (très bien réalisé, vous le remarquerez, par le Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne).


Le viticulteur doit se fier à ces indications sur le cycle de la nature afin d'entretenir ses cultures correctement. Bien entendu, il doit être capable de faire face à bon nombres de problèmes imprévus tout au long de l'année : intempéries (tempêtes, casse, grêle, humidité stagnante, gel, sécheresse aride, etc...), ravageurs (rongeurs, papillons, parasites, vers, etc...) et maladies diverses (et encore, j'en oublie volontairement, on pourrait y passer des heures). Les plus consciencieux travailleront de sorte à concorder avec le calendrier lunaire. Eh oui! Ce n'est pas un mythe et cela fonctionne pour tout ce que vous cultivez, tout comme il y a des saisons favorables selon tel ou tel type de culture. Les astres agissent sur tout le monde, c'est un fait. Comprendre cela c'est prendre conscience que la nature a un ordre donné, qu'il est bon d'essayer de préserver au maximum si l'on souhaite conserver un avenir sur cette planète. Et encore, je n'en suis même pas arrivé à vous parler de l'agriculture biologique! On y vient, justement, rapidement.

Puisqu'il y a des problèmes dans la vigne, les vignerons et les scientifiques ont mis au point des traitements de choc. Certains sont très efficaces, mais ne respectent pas franchement la nature. Et, si vous avez correctement suivi jusqu'ici, vous savez que la première clef du vin est cette même nature. Donc, si vous bousillez cette clef, la serrure du coffre restera à jamais scellée. C'est exactement à ce niveau que les grands domaines (dans le sens compétents, rien à voir avec la taille, simple précision) font généralement la différence. Un bon vigneron va être très attentionné dans son oeuvre et va chercher l'expression de son terroir, avant d'appliquer sa propre patte, comme on dit. C'est à dire orienter le goût final vers ce qu'il apprécie, ou trouve intéressant.

Fin de la parenthèse "bio bien bon" (ce que je ne défends qu'à moitié, à titre personnel), qui est un sujet trop vaste pour être vraiment développé ici (ce qui sera fait une autre fois, soyez en sûrs). Passons donc à cette fameuse partie, étroitement liée à l'oenologie : la vinification. Là encore, je vous délivre un schéma explicatif sur le sujet (simplifié, pour le bonheur de tous), celui-ci provient du domaine Grand Jouan, en Pays Nantais (que je ne connais absolument pas, pour le coup).


Il est à présent de mon devoir de vous expliquer les termes importants notés sur ce schéma. En voici mes propres définitions :

- Foulage et Eraflage : fouler les baies permet notamment d'enlever les pépins en faisant éclater les raisins (on laisse le jus éventuel s'écouler en cuve), tandis qu'érafler consiste à séparer les baies de la rafle (parties boisées, tiges, etc... Ce qui n'est pas systématique, loin de là, surtout dans l'élaboration du rouge).

- Pressurage : ais-je vraiment besoin d'expliquer ça? Ok, vite fait alors! Les grappes sont dans le pressoir, qui peut être conçu de différentes manières (pneumatique "moderne", bois "à l'ancienne", etc...), puis on les écrase progressivement afin d'extraire le jus (il y a souvent plusieurs pressées, celle donnant le jus le plus fin et aromatique est la première, on parle alors de "jus de goutte").

- Débourbage : dans cette étape (qui se fait aussi sur les rouges, d'ailleurs, contrairement à ce que laisse penser le schéma présenté plus tôt), le vinificateur va laisser décanter les jus (aussi appelé "moût" à ce stade) dans une cuve, dans l'optique de laisser les dépôts solides indésirables (terre, feuille, bois, insectes, etc...) au fond, puis d'extraire le jus "sain" par gravité.

- Encuvage : transférer le moût de raisin dans une cuve, en vue de la fermentation alcoolique en l'occurrence. D'où l'expression : "après avoir bien bu, je m'en vais cuver ailleurs".

- Macération : peut s'effectuer avant, pendant (c'est le cas des rouges, souvent), ou après fermentation. La macération sert à laisser le jus échanger avec les matières solides (peau, pulpe, et autres), soit extraire des éléments qui pourraient s'avérer intéressants vis-à-vis du produit final (coloration, arômes naturels, tanins, etc...). Cette partie est importante dans le cadre de la vinification en rosé, puisque sa courte durée (ou son absence, l'échange durant le pressurage étant alors suffisant à la fabrication d'un rosé léger) permet de définir quel type de rosé on aura en bouteille (foncé ou clair, corsé ou léger, pour raccourcir). La durée de la macération peut donc varier, j'ai relevé, toutefois, que la douzaine de jours (concernant le rouge, du côté des blancs cette étape est moins répandue, actuellement) revenait souvent chez les producteurs visités.

- Fermentation Alcoolique : si vous sautez ce passage, ce que vous aurez produit s'appelle du bourru. Du moût non fermenté en somme, qui risque de lancer sa fermentation tout seul (grâce à l'action des levures indigènes et du sucre présent), en bouteille (donc, qui ne se garde pas longtemps, même au frais). Si vous voulez faire du vin, il va falloir passer tout ça en cuve de fermentation (thermo-régulée, afin de favoriser l'entrée en matière des levures, qui agissent selon la température, et de contrôler la chaleur, qui pourrait abîmer le jus et son arôme notamment). Il arrive que l'on ai besoin d'adjonction de levures exogènes (ce qui n'a rien de honteux, pour le coup, cela dépend parfois d'autres facteurs que des choix du chef de culture), ou de sucre (ce dernier point se nomme la "chaptalisation"). Après analyse en laboratoire, le vigneron-oenologue-maître de chais peut vite être fixé sur la marche à suivre. Une fois que les levures baignent dans le jus sucré (et que la température du bain leur plait), elles vont commencer à transformer le sucre en alcool, la présence d'oxygène est également nécessaire. Pendant ce temps là, si on est en train de fabriquer un vin rouge, le vinificateur va favoriser la macération en effectuant le pigeage (vous savez, ce qu'on faisait avec les pieds en l'an de grâce 1123, hein Jacquouille?) et le remontage (on arrose le chapeau solide formé à la surface de la cuve avec le jus, que l'on soutire pas le bas, ce qui permet de favoriser l'oxygénation du vin en devenir).

- Fermentation Malolactique : dans le vin, l'acidité est un des piliers structurels (tout les vins sont acides, de par leur PH, oui, c'est dit). Sauf qu'au goût, des acides trop puissants ne sont pas agréables, et finissent plus souvent dans l'évier plutôt que dans notre gosier. Ainsi, la fermentation malolactique permet d'atténuer l'acidité du vin, grâce à des bactéries particulières. Ces dernières (après ensemencement, généralement) vont donc s'attaquer aux acides maliques (rugueux), pour en faire des acides lactiques (souples). C'est une phase obligatoire en vinification rouge, facultative pour bien des blancs et rosés. Durant la FML (comme l'appellent les pros), on peut observer des lies de levure se déposer en fond de cuve (qui peut être, d'ailleurs, un tonneau en chêne, par exemple). Ces lies sont fréquemment remuées (selon l'envie du maître de chais, il s'agit du bâtonnage), afin d'échanger un peu de matière avec le vin, d'où la fameuse mention "élevé sur lies" que l'on peut croiser sur les étiquettes de certains Muscadets.

- Filtration : on approche de la fin du processus, le vin est là, mais il est encore trouble. Ceci est toléré par les consommateurs pour le vin rouge, ils n'ont néanmoins pas encore tout compris concernant le blanc et le rosé. Donc, on filtre les vins, littéralement, histoire d'avoir un produit limpide, agréable à l'oeil. Les filtrations fines enlèvent beaucoup de matière, et peuvent même altérer la qualité gustative d'un vin, son expression. Tandis que les filtrations plus grossières vont se contenter de retenir le plus gros, justement, et donc laisser de la matière vivante en bouteille. Comprenez par là qu'un vin de garde sera souvent moins filtré (voir pas du tout) qu'un vin dont la consommation est supposée rapide. Le visuel c'est bien, le goût c'est mieux!

- Elevage et Conditionnement : on peut élever un vin (avant ou après filtration d'ailleurs) "x" temps, une fois qu'on est sûr qu'il s'agisse bien d'une des dernières étapes de notre "vinification". L'élevage en cuve inox permet de concentrer les arômes variétaux (soit l'identité du cépage, son fruité généralement), le passage en tonneau de bois apporte les saveurs boisées et des tanins (selon la jeunesse du dit tonneau). Il existe évidemment d'autres moyens d'élever des vins, ceux-ci sont les plus récurrents et maîtrisés à l'ordre du jour (non, je ne parlerai pas des amphores aujourd'hui!). Certains cahiers des charges (déterminés officiellement par l'INAO, pour rappel) précisent les durées et méthodes à suivre (contenance particulière, etc...), s'il y en a, selon l'appellation. Idem pour le conditionnement, même si les réglementations sont moins courantes, pour le coup (bouteilles en verre, bag in box en plastique, etc...).

Et c'est ainsi que s'achève le premier article de Franc-Gourmet sur le thème du vin. En complément de tout ce que vous trouverez ici sur le sujet, je vous conseille de vous procurer des livres sur le même thème, tels que "L'Atlas des vins de France", de Laure Gasparotto (s'il ne vous en faut qu'un, c'est celui-là). Ce bouquin m'a particulièrement servi et me servira encore. Ses cartes de vignobles sont en fait les meilleures que j'ai pu croiser jusque là (elles sont globales et relativement faciles à lire). De nombreuses autres informations sont répertoriées au fil des pages de cet ouvrage, bien entendu, et les parcourir vous permettra de vous familiariser très fortement avec l'univers fantastique, ô combien vaste et passionnant, du vin!

Sur ce, à la prochaine chers gourmets.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire